La SFEN Bourgogne Franche Comté a organisé une conférence[1] sur ce thème conjointement avec WiN Bourgogne, l’UTB, à Chalon, le jeudi 28 Septembre 2017. Yves Fournier ancien responsable technique à AREVA St Marcel, a ainsi retracé les débuts de l’histoire de cette puissante source d’énergie aux USA, qui fournit 75% de l’électricité en France.
Yves Fournier : « le nucléaire civil a pu se développer grâce à la propulsion nucléaire des sous-marins aux Etats Unis »
L’idée germait dès 1939. Après l’explosion des bombes d’Hiroshima et Nagasaki en 1945, la mise en place d’un accord international pour le contrôle de l’arme nucléaire échoue. La France crée le CEA dès 1945, les USA auront l’Atomic Energy Commission en 1947.
Les différends intervenants pour soutenir ou intervenir dans ce projet sont nombreux : Brien McMahon, Lilienthal, Earle Mills, Albert Mumma, entre autres. Parmi eux la personnalité de Hyman Rickover[2] (1900-1986) a un relief particulier. Ce juif polonais émigré en 1906 devient ingénieur électricien à Annapolis et Columbia. Sous marinier de 1929 à 1933.Yves Fournier : « dans sa carrière il a commandé un sous-marin, il a donc une sensibilité de sous-marinier. Il obtient en 1949 la direction du projet Nautilus. Travailleur acharné, très compétent techniquement et hyper centralisateur, il embauche lui-même 10 000 personnes après en avoir vu 50 000 ». Il s’installe dans des bureaux à Washington et réunit les labos, les entreprises …en obligeant les chefs d’entreprises et tous les acteurs à suivre une formation continue en physique nucléaire.
C’est alors la technique de l’eau pressurisée qui est choisie avec, en parallèle, une autre solution avec le refroidissement au sodium. On a vu très tôt apparaître les différents modèles qui seront retenus par l’organisation Génération IV au début du 21ème siècle.
Dès 1950, on estimait que les russes possédaient cinq fois plus de sous-marins conventionnels que les Américains. L’idée était de construire un sous-marin possédant une très longue autonomie donc alimenté par un réacteur adapté.
Les différentes sociétés qui ont travaillé sur ce projet sont General Electric et Westinghouse. GE a fait passer l’idée qu’une société privée pouvait avoir un labo de recherches. Sur l’ordre de Rickover, Westinghouse en construit un, Bettis Lab, et en trois mois y implante une usine de fabrication de barres de zirconium. Dès 1950 la structure de base du PWR ressemble à ce que nous connaissons aujourd’hui.
Le 14 Juin 1952 le Nautilus est inauguré par le Président Truman, puis, lancé le 20 Janvier 1954 par Mamie Eisenhower, le 3 Aout 1958, il est le premier sous-marin à passer sous la banquise.
Mais pour développer le nucléaire civil, il fallait des investissements civils. A ce moment là, des grèves dans les mines de charbon provoquent des ruptures d’approvisionnement. C’est alors que Duquesne Light soutient le projet nucléaire. Le 2 décembre 1957, le réacteur nucléaire de Shippingport est le premier PWR aux USA à produire de l’électricité sur le réseau avec une puissance de 60 MW.
Yves Fournier rappelle les événements qui ont accompagné ce développement : « La création de l’AIEA en 1957, la création de l’EURATOM (indépendante du traité de Rome), Framatome existe depuis 1958, Schneider Electric a fait le lien avec les USA pour l’achat des licences…et, sur le principe, finalement les choix de Rickover faits en 1955 sont ceux, globalement, du PWR de 2017 »
Anne-Marie Goube
[1] Pour les adhérents de la SFEN l’Audio de la conférence est disponible sur le site SFEN Bourgogne Franche Comté http://sfenbourgogne.fr/conferences/nucleaire/presentation/180/la-naissance-du-nucleaire-civil-aux-etats-unis/
[2] Parmi les nombreux ouvrages sur cette personnalité : « The Rickover effect, how one man made a difference » par Theodore Rockwell